Mémoire locale de Rohan : Jean Rouault, cinéaste de son pays

De la projection à la réalisation : histoire de la famille Rouault de Rohan.


Début du 20ème siècle, nous sommes à Rohan petite commune de moins de mille habitants
située au cœur de la Bretagne, non loin de Loudéac. Deux frères, Jean-Marie et Joachim Rouault, fils d’agriculteur, passionnés par les nouvelles technologies rejoignent la capitale pour acheter un appareil de projection 35 mm de marque « De Maria Lapierre ». C’est dans le grenier de la ferme familiale de Kervégan, entouré de paille, qu’ils projettent les films muets qu’ils reçoivent de Paris.
Très vite, le bouche à oreille fonctionne et l’on apprend dans la commune que les frères Rouault font défiler des images en les commentant et en réalisant des bruits de fonds. La population, ravie de découvrir des gens marcher sur les murs, est à chaque fois plus nombreuse à assister aux projections. Pour attirer plus de monde et faire leur publicité, les affiches et les programmes, ils s’équipent très vite d’une imprimerie. Rapidement leur travail est récompensé et cette activité de loisir leur permet d’ouvrir une boutique d’horlogerie-bijouterie et photographie à Rohan. Mais la guerre éclate et met définitivement un terme aux projections de films.

En 1924, Jean Rouault, fils de Jean-Marie, naît à Rohan. Adolescent, avec l’aide d’un cousin, il répare le vieux projecteur 35mm et projette, pour le plaisir de la famille, les films conservés par son père et son oncle.

En 1947, Jean Rouault achète sa première caméra ETM 16mm à ressort, ainsi qu’un projecteur. Avec l’aide de son cousin, il projette des films à Rohan et dans les communes environnantes.
Les films, sonores, sont accompagnés, en première partie, des actualités régionales et locales réalisées par Jean Rouault lui-même.

1947 est une belle année pour Jean Rouault. Il a l’occasion d’immortaliser, pour le plaisir de tous, des moments forts pour la région. L’un des premiers films qu’il réalise en 16mm est en effet la visite du Général De Gaulle à Saint Marcel (Morbihan), haut lieu de la résistance bretonne pendant la Seconde Guerre Mondiale. Seul amateur à posséder une caméra, il est invité à s’approcher du Général par un officier. Il réalise ainsi près de dix minutes de film. C’est celui dont il est le plus fier encore aujourd’hui. Mais il n’oublie pas non plus l’émotion d’avoir filmé le retour de l’enfant du pays, Jean Robic, à Radénac et la fête qui s’en est suivie en l’honneur de sa victoire au Tour de France 1947.
Pendant près de dix ans, il va ainsi travailler à la boutique d’horlogerie-bijouterie la semaine, et présenter des documentaires et des films le dimanche.

Témoin unique de la vie passée de Rohan, Jean Rouault a immortalisé les moments de fêtes de la commune comme les kermesses, les fêtes Dieu, mais aussi le quotidien des habitants.  Aujourd’hui, ces films sont des témoignages importants d’une petite commune rurale du centre Bretagne, pays dont les images se font encore trop rares.